Madame, permettez, humblement que je puisse
Ébranler la vertu de votre identité :
Jupiter magnanime aurait pu de sa cuisse
Tout au plus retirer vos monts de vanité,
Tant les faibles espoirs que vos pleurs réussissent
A vous faire Vénus, drapée de dignité,
Se noyaient sans appel dans vos sombres rivières,
Où vous lâchiez sans honte un long flot de vipères.
J’ai ouïe dire l’Amour, en temps appropriés,
Sait révolutionner l’homme le plus volage »
Et porter dans son cœur par les plus doux voilages
Un céleste transport qu’on n’oserait prier!
Moi je trouve insultant de fonder sur mon âge
Des errements d’idées qui voudraient mettre en cage
A coups de jugements l’ardeur dont vous riiez!
Non! L’alcôve éthérée n’est pas votre apanage
Sous couvert qu’un beau jour vous vous soyez mariée!
Au contraire, je lis sur l’encre de vos pages
Tout le poids d’une aigreur née d’un songe avarié…
Rêvez donc à ce champs qui pour vous m’est si cher,
Ainsi qu’à vos fruits d’or dont je serais friand :
Examinez leur robe et voyez leur brillant!
Cachent-ils dans l’éclat des années de jachère?
Ont-ils dans leur parfum l’expression surannée
D’époques révolues où l’on goûtait leur chair?
Je crois que le printemps qui aimait pavaner
A l’ombre du zénith vous offrant quelques grâces
Reprendra dans ses nuits les faveurs du Parnasse
Si sur l’arbre je vois votre fleur se faner.
Mais il ne tient qu’à vous de ne pas dépérir
En laissant s’assécher vos terres d’émotions :
Je voulais simplement, jardinier conquérir
Votre être en l’arrosant de ma dévotion…
Aujourd’hui acceptez que je puisse guérir
Vos manques d’affection d’un trait de ma potion :
Buvez donc lentement ce précieux élixir,
Il est pour votre vie sa plus forte caution!